Cazères et la Garonne

Écrit par Robert Foch    21-03-2008

Aux yeux de l’administration d’autrefois – il existait en 1780 un Conservateur général de la Garonne – la Garonne était flottable du Val d’Aran à Cazères, et flottable et navigable en aval.

C’était au temps où le barrage de Labrioulette n’existait pas…

Pont(s) du diable, avant la montée des eaux du barrage de Labrioulette

La Garonne flottable était celle des radeaux faits de troncs d’arbre, parfois destinés à la mâture des vaisseaux du roi. Mais ils étaient aussi chargés, pour les transporter jusqu’au Port-Garaud de Toulouse, de pierres de Belbèze, de bois à brûler mesuré en cannes, de chaux (de Cérisols), de plâtre (de Betchat). Il arriva même qu’on leur confiât des marbres de Sarrancolin et de Saint-Béat pour le Louvre ou Versailles. Les obstacles à leur descente étaient nombreux et périlleux : rochers et rapides, paissières des moulins – il en existait 44 entre Fos et Cazères – qui obligeaient parfois qu’on défasse les trains de radeaux pour les contourner. Le chemin de fer, vers 1860, porta un coup fatal au radelage, qui se poursuivit sur le versant espagnol jusque vers 1940.

 

 

 

Train de radeaux sur un des rios Noguera Paissière de Montréjeau (Aragon)

 

 

 

 

 

 

 

Barque de pêche

A Cazères la Garonne devenait navigable. Les embarcations à fond plat et aux extrémités relevées ne variaient que par
leurs dimensions, selon leur utilité :
-transport,
-pêche du sable,
-capture du poisson.

Parmi les barques de transport, il y avait les bacs pour traverser le fleuve en l’absence de pont; d’ autres descendaient à Toulouse en six heures… quand il y avait de l’eau. Elles transportaient les mêmes produits que les radeaux, des tonneaux, des veaux d’Arbas vivants et entravés et… des passagers. Les plus aisés des gens du fleuve – on en comptait encore 90 à Cazères vers 1851 – étaient les patrons-marchands de bois, et les plus misérables les tireurs de barques qui les remontaient de Toulouse en trois jours avec leur bricole, alors qu’il n’existait aucun chemin de halage !

Les débuts du XXe siècle virent apparaître des embarcations beaucoup plus importantes, les sapines, péniches qu’on retrouvait sur les canaux du Midi, de Sète à Bordeaux.

Transport
de tonneaux
sur le canal

 

Radeaux et barques connaissaient des accidents dramatiques.
En 1765, le jour de la Saint-Roch, le bac qui ramenait en soirée de la foire de Cazères hommes et bêtes heurta un rocher devant Couladère.
Il y eut au moins 18 victimes, la plupart originaires des villages de la « montagne » :  Saint-Christaud, Montberaud, Sainte-Croix, etc…
Les registres paroissiaux sont remplis de ces morts de Garonne, que N.-D. de Lagouach n’était pas parvenue à sauver.
Ex-voto de la chapelle de Lagouach

 

 

Plaque de la maison Lécussan

Port fluvial, Cazères fut le siège d’une Inscription Maritime, ce qui valut à quelques cazériens d’être recrutés de force dans « la Royale » et même, pour l’un d’entre eux, d’être présent à Trafalgar. La ville eut aussi ses chantiers navals. Le nom de deux familles leur est associé : les Atoch et les Lécussan.

Le hangar aux bateaux

A l’entrée du pont actuel, sur la rive gauche, un vieil hangar de bois autrefois précédé d’un plan incliné vers le fleuve, et que le lierre maintient debout, est le seul souvenir de cette activité. Faudra-t-il attendre qu’il disparaisse ?   ***

C’est peut-être là que furent construits l’un des derniers bateaux-lavoir ancré au port de la Daurade à Toulouse et les deux barques de pêcheurs de sable qui l’accompagnent sur une carte postale de 1910.

Toulouse, bateau-lavoir et pêcheurs de sable

*** Depuis cet article le hangar aux bateaux a été réhabilité et s’appelle maintenant la maison Garonne.

Merci à  » Bernie Blogueur Chroniqueur  » pour son autorisation de publier cette photo https://www.bernieshoot.fr/